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Sandra Hüller : «J’ai vraiment dû retrouver le chemin de la joie»

Adrien Kuenzy
25 mai 2023

Sandra Hüller incarne dans « Anatomie d’une chute » un personnage qui porte le même prénom. © Les Films Pelléas - Les Films de Pierre

Sept ans après la sortie du film « Toni Erdmann », présenté au Festival de Cannes, l'actrice allemande Sandra Hüller revient sur la Croisette avec deux films en compétition, « Anatomie d’une chute », de Justine Triet, et « The Zone of Interest », de Jonathan Glazer. Interview.

Malgré la courte durée de l’entretien au Festival de Cannes, Sandra Hüller prend le temps de la réflexion avant chaque réponse, toujours avec beaucoup d’humilité et de passion quand elle évoque son métier. Il faut dire que l’actrice allemande revient en force cette année sur la Croisette, avec deux films en compétition. Dans « The Zone of Interest » de Jonathan Glazer, la comédienne de 45 ans incarne la femme du commandant du camp d’Auschwitz-Birkenau. Ils mènent une vie familiale dans une maison située à proximité du camp. De manière radicalement différente, elle plonge à travers « Anatomie d’une chute » de Justine Triet dans le personnage d’une autrice soupçonnée d’avoir tué son partenaire. Les deux films sortiront prochainement dans nos salles. Entretien lors d’une rencontre avec un petit groupe de journalistes.  

 

Dans « Anatomie d’une chute », vous passez du français à l’anglais constamment et votre personnage passe également au travers de nombreux états émotionnels. Le rôle était-il compliqué à incarner ?

La façon dont nous avons travaillé avec Justine Triet m’a beaucoup aidé. En tant que réalisatrice, elle n’exige pas, mais fait plutôt des suggestions. À ses côtés, un tournage s’apparente au processus théâtral. Elle donne beaucoup de temps pour évoluer, développer le personnage, se tromper et, s’il le faut, tout recommencer. La première scène de l’interview, face à l’étudiante, a dû par exemple être tournée une seconde fois dans sa totalité. Au début du tournage, j’ai ressenti beaucoup de pression, sans bien savoir comment présenter ce personnage. Tout est devenu plus clair par la suite, en plongeant peu à peu dans chaque moment de la vie de Sandra.

 

Qu'est-ce qui vous a attiré dans ce film, ainsi que dans « The Zone of Interest » ?

D’abord, le fait que « The Zone of Interest » parvienne à prendre du recul par rapport à la dimension historique m’a plu. Disons aussi que je n’ai jamais vraiment eu envie de prendre part à un projet dépeignant le fascisme. Ce n'est vraiment pas quelque chose que je voulais faire. Mais dès que j’ai rencontré Jonathan Glazer, j'ai su qu'il serait mon partenaire et j'ai eu de nombreuses conversations avec des proches qui m'ont dit : « il faut bien que quelqu'un le fasse ». Il est important de montrer la perversité de notre mode de vie, que nous pratiquons tous au quotidien. Nous fermons les yeux par commodité sur des choses qui nous font peur ou qui troublent notre paix. En ce qui concerne « Anatomie d’une chute », la dimension du langage m’a beaucoup intéressée. J’avais déjà travaillé avec Justine Triet et c’est devenu une amie. J’ai immédiatement dit oui quand elle m’a parlé du scénario, parce que c’était un challenge.

 

Quand Sandra détaille les problèmes de son couple au tribunal, on sent aussi une forme de soulagement, comme si c’était la première fois qu’on l’écoutait. Qu’en pensez-vous ?

Je ne sais pas. Je veux dire, c’est une écrivaine, beaucoup de gens l’écoutent. Je n’ai pas ressenti cela. J’ai plutôt l’impression qu’elle est très mal à l’aise en décrivant à ce point sa relation. Je ne souhaite cela à personne.

 

Comment choisissez-vous vos rôles ? Les trois derniers sont très différents, mais toujours audacieux. Vous faut-il toujours un défi ?

Vous savez, après « Toni Erdmann » je ne savais pas du tout quoi faire, où aller, ce fût une période de crise pour moi. On me demandait de jouer toujours les mêmes personnages, encore et encore, des femmes d’affaires. Mais moi j’avais déjà fait ça et je me suis demandé ce que je voulais explorer ensuite. J’ai donc essayé différentes choses qui ne me correspondaient pas nécessairement, et j’ai vraiment dû retrouver le chemin de la joie. Bien sûr, je savais que je faisais du bon travail, mais trouver un sujet qui fait sens, qui reflète des questions que je me pose vraiment, ça m’a vraiment pris du temps. Je n’ai fait que du théâtre avant ces deux projets.

 

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