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Nouvelles ordonnances de la loi sur le cinéma

Roland Hurschler
13 janvier 2023

Roland Hurschler est Secrétaire général de l’ARF/FDS, Association suisse des réalisateur·trice·s et scénaristes © Martin Guggisberg

Le 2 novembre dernier, le Conseil fédéral a ouvert la procédure de consultation sur les ordonnances relatives au « quota pour les films européens » et aux « investissements dans la création cinématographique suisse ». Il y est question des dispositions d’exécution de la « Lex Netflix ».

L’introduction du quota de 30 % de films européens est un alignement sur le droit de l’UE, visant à atténuer notre isolement au sein de l’Europe. L’ordonnance fixe les critères déterminant les productions éligibles et les dispositions relatives au contrôle du respect de l’obligation.
L’ordonnance sur l’obligation d’investir 4 % règle l’obligation qui incombera au 1er janvier 2024 à tous les principaux fournisseurs de contenus audiovisuels. Jusqu’ici, elle ne concernait qu’une poignée de fournisseurs nationaux comme Teleclub (blue) et les chaînes de TV privées suprarégionales. Elle était régie par des dispositions formulées de manière très lacunaire dans la loi sur la radio et la télévision (LRTV).

L’enjeu principal de la « Lex Netflix » a toujours été d’ordre économique : il s’agissait en premier lieu de la Promotion de l’investissement dans la cinématographie en Suisse (PICS) et du rayonnement international de la culture cinématographique helvétique. C’est ce qui explique le soutien qu’elle a connu de la part de la branche ainsi que des milieux de la culture, du tourisme et de la politique.

Mais qu’en est-il des aspects culturels ? L’ordonnance aura-t-elle un impact sur la position fragile des responsables des contenus audiovisuels ? Certes, scénaristes et réalisateur·trice·s perçoivent l’opportunité que représente la nouvelle loi sur le cinéma. Elle amènera de nouvelles perspectives d’emploi et alimentera une professionnalisation croissante. Davantage de commandes signifiera une plus grande continuité dans le travail et plus d’expérience ; des budgets mieux pourvus permettront un travail plus long et plus soutenu dans certaines phases de production.

Mais on redoute aussi que les puissants acteurs internationaux viennent torpiller le rapport de forces établi entre production, droit d’auteur et exploitation. Il sera essentiel de veiller à sauvegarder les réglementations suisses sur les droits d’exploitation dans le cadre des nouvelles formes de production et de distribution. Dans le domaine linéaire, nous disposons déjà d’usages largement acceptés, qui garantissent que les auteur·trice·s des contenus audiovisuels participent de façon proportionnelle à l’exploitation de leurs œuvres.

Il sera indispensable de maintenir ces dispositions, qui ont fait leurs preuves depuis des décennies et qui sont consignées dans les modèles de contrats. La nouvelle loi sur le cinéma comporte un bon point d’ancrage au niveau de l’article 13 (« Versement des rémunérations dues aux sociétés de gestion agréées »). Sans cela, nous verrons disparaître d’importantes redevances en provenance de l’étranger, surtout celles qui résultent de l’exploitation VOD sur les gros marchés d’exportation.

Les pratiques de buy-out, courantes dans les pays anglo-saxons, ne sont pas souhaitables dans notre système. Si nous admettons que les ordonnances sur le cinéma doivent également renforcer durablement le versant créatif de la branche, elles ne doivent en aucun cas encourager l’implémentation de ce système.

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