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Frame: «Manifeste en faveur du cinéma de demain»


21 juillet 2017

Frame a publié début juillet un dossier sur le cinéma suisse qui comportait un certain nombre de critiques ainsi que des propositions pour transformer le cinéma suisse. Les textes ont suscité de nombreuses discussions dans la branche. Afin de les rendre accessibles au professionnels francophones, nous avons traduit ici le manifeste publié par la revue. Il est signé par Denise Bucher et Christian Jungen et soutient des positions tranchées, voire provocatrices.

 

1. La définition même du film doit être renouvelée
La digitalisation s’est, et ce depuis longtemps, étendue au cinéma et est entrain de tout chambouler, de la production à la distribution en passant par la consommation. C’est pourquoi il faut aujourd’hui élargir la signification du terme « film ». Celui-ci doit réunir toutes les formes de récit audiovisuel, indépendamment de la forme et du canal de distribution. En font partie les jeux vidéo, les projets de réalité augmentée et virtuelle, tout comme les séries et les films destinés à la vidéo à la demande.

2. Institut national du film suisse
La Suisse a besoin d’un lieu de formation national, où les cinéastes en devenir provenant de toutes les régions du pays puissent échanger leurs idées et aussi bénéficier de l’enseignement de personnalités étrangères, telles que Michael Haneke. Ainsi, ils seraient à même de développer, dans leur propre pays, une connaissance des enjeux internationaux. À titre d’exemple, le personnel enseignant de la ZHdK est aujourd’hui ancré bien trop localement et focalisé sur le marché intérieur.

3. Plus de scénarios
C’est une catastrophe : la Confédération délivre plus de subventions pour la création de films que pour l’écriture de scénarios. On ne peut pas continuer comme ça. Il faut soutenir, massivement, plus de scénarios et que les meilleurs d’entre eux soient réalisés. Le reste finit à la poubelle, comme à Hollywood. Le métier d’auteur de scénarios doit être reconnu. Sans bonnes histoires, il n’y a pas de bons films.

4. Nous avons besoin d’un intendant
Au sein de la Zürcher Filmstiftung et à l'OFC, ce sont des commissions de cinq personnes qui décident quels projets seront subventionnés. Cela mène à un cinéma consensuel. Il faut que des intendants remplacent ces commissions ; un modèle qui a fait ses preuves au Danemark et en Suède et qui permet des prises de décisions plus courageuses et clarifie les responsabilités. Des frais de dossier de 1500.- CHF devraient par ailleurs être établis, ce afin que seules des personnes dotées d’intentions sérieuses déposent une demande.

5. Assez avec la méthode de l’arrosoir
Les subventions vont aujourd’hui au plus grand nombre de films possible. Ivo Kummer compare le paysage du cinéma à un biotope, on ne sait jamais où quelque chose va éclore. Cette politique est un échec. Il faut, comme en Scandinavie, soutenir moins de films, mais par de plus grandes sommes. La limite maximale de 1 million de francs doit être abrogée.

6. Plus de premiers films
En Suisse, la création de premières œuvres est, en comparaison, moindre. En Israël par exemple, c’est un tiers des financements qui leurs sont attribuées. En fonction de quoi, ce pays brille bien souvent avec ses jeunes talents dans les festivals internationaux. La Suisse doit encourager les premières œuvres, avec des subventions jusqu’à 300 000 francs, délivrées sans grandes conditions.

7. Ciao Swiss Films
L’agence de promotion étatique doit être supprimée. Elle est inefficace et gourmande en moyens financiers, pour des frais de personnels et de déplacements. Le budget actuel de 2,8 millions pourrait servir à soutenir des producteurs couronnés de succès, comme ceux nominés aux Oscars. Ce sont souvent les producteurs eux-mêmes qui savent le mieux faire la promotion de leurs propres films.

8. Mettre la barre plus haut pour Succès cinéma
L’aide fédérale au film, qui se veut dépendante du succès rencontré, est une mauvaise blague. 10'000 entrées suffisent à l’attribution d’une contribution au développement d’un nouveau projet. Cette limite doit être au minimum quintuplée. Les producteurs qui auraient, au cours des trois dernières années, vu leurs films passer la barre des 500 000 spectateurs devraient par ailleurs bénéficier d’un engagement, à hauteur de millions, de la part de la Confédération.

9. Changement de génération
La promotion du film a besoin d’un vent nouveau et de buts placés plus haut en matière de succès sur le marché domestique et sur les festivals. Les responsables ne devraient pas uniquement se considérer comme des prestataires de services de leur branche, ils devraient également penser au public. Un rajeunissement ne fait jamais de mal : c’est au moment où le Nouveau Film suisse connaissait son heure de gloire à l’international dans les années 70, qu’Alex Bänninger prenait, à 29 ans, ses fonctions de chef du film de la Confédération.

10. Crédits d’impôts pour les personnes privées
Le film suisse est trop dépendant des subventions. Il y a trop peu de capitaux privés investis. La Confédération et les cantons devraient accorder des baisses d’impôts aux investisseurs. Des pays comme l’Espagne (15% sur les dépenses locales) et la Tchéquie (20%) ont, grâce à l’introduction d’une baisse des taxes, su attirer des productions internationales et créer ainsi de nouvelles places du travail dans le domaine du film.

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