Matthias Joulaud et Lucien Roux, sélectionnés à Visions du Réel avec leur film de master, s’intéressent à la question des communautés agraires en Europe.

Dans le cadre du festival Visions du Réel, le public pourra découvrir un court métrage produit en Suisse (Akka Films, en collaboration avec le Master HEAD/ECAL), tourné en Irlande et réalisé par deux Français. Il s’agit de « Ramboy », qui raconte la vie d’un groupe de bergers sur l’île d’Achill, en Irlande. Pourquoi ce choix? « Avec Lucien, on s’est toujours intéressés aux pratiques agraires, à leur survie », raconte Matthias Joulaud, qui a tourné le film durant ses études et partage la mise en scène avec Lucien Roux. « Achill Island était un cas très fascinant, car là-bas, tout se passe en mode utopique, c’est une culture insulaire et il n’y a pas de prédateurs. Et même si cela ne faisait pas partie de l’enjeu au début, c’était fascinant de découvrir comment le fonctionnement s’inscrit dans une logique européenne : il n’y a plus de pêche dans la région, car l’UE a choisi de mettre l’accent sur l’élevage de brebis. » Il y avait aussi une volonté pédagogique, dit-il : « On voulait améliorer notre anglais, et sortir du confort de la langue française, ce qu’on a fait pendant les deux ou trois mois de tournage. »

Pour Jasmin Basic, qui a suivi le projet en tant qu’adjointe artistique du Master en Cinéma, le film représente un défi : « Comme dans tout documentaire, Matthias a dû faire face aux aléas du réel pour trouver ses personnages et son histoire. Mais cela a aussi été une aventure organisationnelle : réussir, en pleine période de restrictions Covid, à partir en repérages et ensuite en tournage sur une île irlandaise n’a pas été une affaire facile. Cependant, la petite équipe a réussi à surmonter ces obstacles. » Elle ajoute: « Pour moi, c’est aussi – et surtout – le reflet d’une convergence de savoir-faire plus que réussie au sein de la formation Master Cinéma 2020-22 : Matthias Joulaud en Master Réalisation, Selin Dettwiler en Master Montage et Yatoni Roy Cantû en Master Son, avec le suivi précieux de Jacqueline Zünd, tutrice réalisation ; Gion Reto Killias, tuteur montage, et Nathalie Vidal, tutrice son. Une vraie success-story. »

 

Tisser des liens

Les deux cinéastes se connaissent depuis des années, et ils se sont vite rendu compte que le documentaire était l’expression idéale de leur vision artistique. « Nous apprécions les œuvres qui s’ouvrent sur le monde », explique Lucien Roux. « On aime inclure les gens dans notre travail. Cet esprit de partage est d’ailleurs bien honoré par la sélection de notre film dans la compétition des courts internationaux de Visions du Réel, qui valide notre travail. Par rapport à nos projets précédents, on se sent moins seuls. » Pensent-ils déjà à un long métrage ? « On travaille déjà sur quelque chose », répond Matthias Joulaud. « On a commencé à tourner en France, dans la région du Massif central. Là aussi, il s’agit d’une communauté agraire, et on a tissé des liens avec un paysan sourd-muet, qui a un rapport très spécial avec les animaux. On ne sait pas encore si c’est un court ou un long métrage qui découlera de cette expérience. »